Le droit de la responsabilité en matière équestre

Le droit de la responsabilité en matière équestre

 

ELEMENTS DE REFLEXION

I.         La mise en œuvre de la responsabilité des acteurs du monde équestre en vertu d’un contrat

A.        L’organisateur de manifestations sportives est responsable envers les participants

B.        La responsabilité du moniteur de centre équestre souvent mise en œuvre par les cavaliers

C.        Un régime de responsabilité légèrement assoupli pour le loueur d’équidé

D.        Les causes exonératoires de responsabilité de l’ensemble des acteurs

 

II.        Les cas de responsabilité des acteurs équestres en dehors d’un contrat

A.        Le cavalier est responsable du dommage causé à autrui hormis dans le cadre d’une compétition

B.        La mise en œuvre de la responsabilité de l’organisateur des manifestations sportives par les spectateurs non payants et les tiers

C.        Les causes exonératoires de responsabilité de l’ensemble des acteurs. 26

Conclusion

 

ELEMENTS DE REFLEXION

 

L’équitation est d’abord une passion mais c’est un aussi sport risqué, qui peut entraîner de nombreuses séquelles pour les cavaliers.

 

Ce sport se pratique en tant qu’amateur, mais également en tant que professionnel.

Différent des autres sports, qui se pratiquent uniquement entre êtres humains, individuellement ou collectivement, l’équitation est un sport qui place sous le contrôle d’un cavalier, un cheval, souvent imprévisible.

 

Cette imprévisibilité va être subie par le cavalier qui en fait les frais, lors d’une chute, faisant naître des préjudices corporels qui peuvent être légers ou parfois très lourds.

 

Dans ce cas, le cavalier accidenté cherchera un responsable qui peut être tenu de l’indemniser.

La situation est différente si le cavalier est amateur ou professionnel puisque les dommages subis pourront entraîner pour ce dernier une impossibilité de continuer sa carrière dans le monde équestre.

 

Cette étude exposera clairement les différentes règles de droit applicables à la responsabilité en matière équestre et à la réparation des victimes de dommages occasionnés par les responsables identifiés.

 

Force est de constater que le sujet ne va poser que des problèmes fondamentaux de responsabilité et deviendra beaucoup plus complexe dès lors qu’il s’agit de considérer le sort des cavaliers blessés lors de compétitions équestres.

En effet, la responsabilité en matière équestre est prévue par un ensemble de textes législatifs généraux, et pour certains plus spécialisés, ainsi que par un grand nombre de jurisprudences.

 

 

Nous constaterons ainsi que la responsabilité mise en œuvre par les victimes d’accidents où un cheval est impliqué est engagée selon les situations juridiques sur le fondement de la responsabilité civile contractuelle ou délictuelle.

 

En effet, en matière équestre, la responsabilité civile est la plus souvent engagée car elle permet de réparer les dommages corporels ou moraux.

 

Pour obtenir la réparation du dommage qu’elle a subi, la victime doit déterminer si elle doit mettre en œuvre la responsabilité contractuelle ou la responsabilité délictuelle de l’auteur.

Le cumul des deux responsabilités étant impossible.

En effet, la victime n’a pas le choix entre ces deux fondements puisque le législateur a fixé la possibilité d’action de la victime.

 

Les éléments à déterminer sont : qui est responsable du dommage et dans quel cadre celui-ci se déroule ?

Si la victime subit un dommage dans le cadre de l’exécution d’un contrat, elle mettra en cause la responsabilité contractuelle de son auteur.

Si le dommage survient en dehors de tout contrat, elle agira sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Nous constaterons que c’est la responsabilité délictuelle qui est le plus souvent mise en œuvre.

 

Par exemple, si un cavalier chute de son cheval lors d’un cours d’équitation dispensé par un moniteur, il invoquera la responsabilité civile contractuelle du moniteur car il existe un contrat entre ces deux parties.

En effet, le cavalier rémunère le moniteur en échange de la dispense d’un cours d’équitation.

 

En revanche, si le cavalier tombe alors qu’il est bousculé par un autre cheval monté par un autre cavalier, dans ce cas, la victime devra mettre en œuvre la responsabilité civile délictuelle de ce cavalier fautif car aucun contrat n’a été conclu entre ces deux cavaliers.

Plusieurs acteurs sont identifiables :

  • Le cavalier, considéré comme gardien du cheval hormis le jockey
  • Le moniteur d’équitation ou le centre équestre
  • Le loueur d’équidés
  • L’organisateur de manifestations sportives
  • Les spectateurs

 

Certains de ces acteurs peuvent être victimes de blessures alors que d’autres peuvent être identifiés comme auteurs des dommages causés.

 

Les plus courants sont naturellement les cavaliers eux-mêmes alors que les spectateurs non payants sont moins souvent impliqués dans des accidents d’équitation.

Le but de cette réflexion est donc de tenter de présenter une synthèse exhaustive des principales situations litigieuses en la matière, et d’apporter des solutions aux situations envisagées : certaines questions évoquées sont très fréquentes alors que d’autres restent plus rares.

Nous reprendrons ainsi une distinction classique au regard de la notion juridique de responsabilité : la mise en œuvre de la responsabilité contractuelle (I) et la mise en œuvre de la responsabilité délictuelle (II).

 

I.La mise en œuvre de la responsabilité des acteurs du monde équestre en vertu d’un contrat

Dans cette partie, nous verrons que la responsabilité contractuelle de certains acteurs peut être mise en œuvre par les cavaliers.

Ce type de responsabilité ne peut être retenue que par les cavaliers en raison de l’existence d’un contrat.

Ce système de responsabilité est principalement fondé sur un texte législatif : l’article 1147 du Code civil qui énonce que : « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part ».

Les acteurs suivants sont tenus à une obligation de sécurité et de prudence en vertu du contrat qui les lie à la victime, et s’ils manquent à cette obligation, ils verront leur responsabilité contractuelle engagée.

La mise en œuvre de la responsabilité contractuelle suppose la réunion de trois conditions cumulatives :

  • Un fait générateur ;
  • Un dommage causé à la victime ;
  • Un lien de causalité entre le fait générateur et le dommage.

 

Trois situations peuvent être distinguées :

  • un cavalier participant à une manifestation sportive peut engager la responsabilité de l’organisateur de cet événement (A).
  • un cavalier peut engager la responsabilité de son moniteur (B).
  • un cavalier peut engager la responsabilité du loueur d’équidés (C).

 

 

A.L’organisateur de manifestations sportives est responsable envers les participants

L’organisateur de manifestations sportives est la personne chargée de l’ensemble des éléments permettant la mise en place et le déroulement d’évènements comme des courses sur les hippodromes ou de compétitions hippiques telles que les concours ou les matchs de polo.

A ce titre, il engage sa responsabilité envers les participants aux compétitions, donc les cavaliers, avec lesquels il est lié par un contrat.

Du fait de ce contrat, l’organisateur de manifestations sportives est tenu à une obligation de prudence et de sécurité (1).

De plus, il a une obligation d’assurance pour lui-même, et il doit informer les participants de la possibilité de s’assurer pour leurs éventuels dommages corporels (2).

 

1.Les obligations principales de sécurité et de prudence de l’organisateur de manifestations sportives

Dès lors qu’un dommage est causé pendant un événement hippique par une infrastructure, par exemple, l’organisateur de cette manifestation sportive peut voir sa responsabilité engagée par un cavalier participant, victime.

La personne chargée d’organiser un événement sportif est liée par un contrat envers les participants qui s’inscrivent auprès d’elle pour participer à cet événement.

 

Plusieurs obligations réciproques découlent de ce contrat, et notamment une obligation de sécurité et de prudence.

En réalité, cette obligation est très vaste. Cependant, il s’agit d’une simple obligation de moyens et non de résultat.

De manière générale, un contrat engage les parties au respect de certaines obligations. Ces obligations peuvent être des obligations « de résultat » ou « de moyens ».

L’obligation de moyens fait naître au profit du débiteur, en l’espèce, l’organisateur de manifestation sportive, le devoir d’exécuter au mieux son contrat en y apportant toutes les ressources possibles, sans en garantir le résultat.

 

A l’inverse, l’obligation de résultat engage le débiteur à utiliser tous les moyens à sa disposition tout en garantissant le résultat.

Dès lors qu’une partie au contrat est tenue à une obligation de résultat, le seul fait de ne pas atteindre le résultat suffit à engager sa responsabilité.

En revanche, une partie tenue à une obligation de moyens ne peut voir sa responsabilité engagée que s’il est démontré un manquement à une de ses obligations notamment une obligation de prudence, ou une faute contractuelle.

Par exemple, un médecin est tenu à une obligation de moyens. Cela signifie que s’il n’arrive pas à sauver la vie d’un patient, il faudra, pour mettre en cause sa responsabilité contractuelle, prouver qu’il n’a pas mis en place tous les moyens à sa disposition et au regard de l’état de la science pour le sauver.

Le seul fait de ne pas avoir pu maintenir en vie son patient ne suffit pas à le rendre responsable car il n’est pas tenu d’une obligation de résultat.

 

C’est la situation à laquelle est confronté un organisateur de manifestation sportive. Il ne peut pas garantir que l’événement aura lieu sans incident mais il va tout faire pour que celui-ci se déroule au mieux et pour cette raison, il est tenu à une obligation de sécurité de moyens.

La différence de régime entre l’obligation de moyens et l’obligation de résultat fait varier les règles de preuves pour le cavalier participant victime.

En effet, dans le cadre d’une obligation de résultat, la victime doit prouver que le cocontractant n’a pas atteint le résultat prévu, alors que s’il s’agit d’une obligation de moyens, la victime doit démontrer que le cocontractant n’a pas mis en œuvre tous les moyens pour parvenir au résultat prévu ou a commis une faute.

Dès lors que le cocontractant a commis une faute dans l’exécution de son obligation de moyens, la victime doit prouver l’existence de cette faute, le préjudice qu’elle a subi et le lien de causalité entre la faute et le préjudice.

 

Ainsi, la charge de la preuve pesant sur la victime est beaucoup plus lourde dans le cas d’une obligation de moyens.

 

Pour engager la responsabilité de l’organisateur, le cavalier victime doit donc démontrer que son dommage a été causé par une faute commise par celui-ci et notamment le non-respect de son obligation de sécurité et de prudence.

Plus particulièrement, la Jurisprudence rappelle cette obligation à l’égard de l’organisateur. Ainsi, « une société de courses est tenue à l’égard des compétiteurs à une obligation générale de sécurité, qui n’est qu’une obligation de moyens, laquelle suppose néanmoins que le dommage survienne dans le temps de la compétition » 1 (Cour d’Appel de Paris, 2e chambre-pôle 2- 17 février 2012-n° R.G : 10/06057).

Il convient de déduire de cette décision que l’organisateur est tenu uniquement de cette obligation de sécurité et de prudence, pendant le déroulement de la compétition et non, avant, lors des entraînements, ni après, lors du repos du cheval.

 

Les cas de faute les plus fréquents résultent d’un défaut des installations, d’une carence dans l’encadrement, d’un défaut de compétence, d’un défaut de surveillant, d’une prise de risque inconsidérée et d’un défaut de secours2.

 

Il est fréquent que le cavalier participant à une compétition fasse une chute à cause de matériels ne trouvant pas à leur place ou encore de matériels mal entretenus. Par exemple, dès lors qu’un obstacle manque de solidité et qu’il est à l’origine d’une chute d’un cavalier, cela constitue une faute de l’organisateur (Cour d’appel de Versailles, 28 septembre 2001, SARL Jump Organisation, Jump Association c/ Liance, MSA Bouches du Rhône, Bulletin JURIDEQUI IDE N° 24 décembre 2001)

 

Il faut ajouter que, l’organisateur, même s’il est tenu d’une obligation de sécurité et de prudence envers les participants, doit informer les participants des risques encourus lors de cet événement.

 

L’organisateur de manifestations sportives donc est tenu par le contrat souscrit par les participants à une obligation de sécurité et de prudence.

Il doit donc veiller à ce que l’événement soit parfaitement organisé, pour éviter tout accident et notamment tout événement dommageable qui pourrait résulter d’un manquement de sa part et pourrait engager sa responsabilité.

De plus, l’organisateur est tenu à une obligation d’assurance.

 

2.L’obligation d’assurance de l’organisateur de manifestations sportives

Il est évident que lors d’une compétition ou d’un concours hippique, par exemple, des accidents peuvent malheureusement survenir.

Du plus léger au plus grave, un accident peut concerner les participants à la compétition mais aussi les spectateurs, les tiers ou encore le personnel employé.

Il est donc obligatoire pour l’organisateur de cette manifestation sportive de souscrire une assurance pour couvrir les éventuels dommages.

 

L’article L.331-9 du Code du sport énonce que : « L’organisation par toute personne autre que l’Etat et les organismes mentionnés à l’article L.321-1 de manifestations sportives ouvertes aux licenciés des fédérations est subordonnée à la souscription par l’organisateur des assurances définies au même article L.321-1 »

L’assurance contractée par les organisateurs de manifestations sportives, qu’ils soient une association, une société ou une fédération sportive ou toute autre personne, assurera à ces derniers « des garanties d’assurances couvrant leur responsabilité civile, celle de leurs préposés salariés ou bénévoles et celle des pratiquants du sport. Les licenciés et pratiquants sont considérés comme des tiers entre eux » selon l’article L.321-1 al 1 du Code du sport.

Dès lors que l’organisateur a contracté cette assurance, il sera protégé en cas de manquement à son obligation de sécurité, mais aussi en cas de manquement de la part de ses salariés et bénévoles. L’assurance couvrira également les dommages causés par les participants les uns envers les autres lors de cet événement.

 

En outre, l’organisateur de manifestations sportives qui ne se soumet pas à cette obligation d’assurance encourt une sanction pénale.

En effet, l’article L.331-12 du Code du sport fixe la sanction encourue par l’organisateur de manifestations sportives n’ayant pas contracté d’assurance : « Le fait pour une personne organisant une manifestation sportive définie à l’article L.331-19 de ne pas souscrire les garanties d’assurances prévues à cet article est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende ».

 

B.La responsabilité du moniteur de centre équestre souvent mise en œuvre par les cavaliers

Lors d’une leçon d’équitation, les personnes susceptibles d’engager leurs responsabilités en cas de faute sont le centre équestre et le moniteur d’équitation.

En effet, l’article 1242 alinéa 5 du Code civil dispose que : « Les maîtres et les commettants [sont responsables] du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ». Il s’agit d’une responsabilité du fait d’autrui.

Dans ce cas, le centre équestre sera responsable de la faute commise par son moniteur salarié.

 

Si le cavalier a subi un dommage lors d’une leçon, par exemple, il se retournera contre le centre équestre qui devra indemniser le cavalier de son préjudice.

Ensuite, le centre équestre pourra se retourner contre le moniteur d’équitation salarié dans le cadre d’un recours en remboursement.

 

En revanche, si le moniteur d’équitation exerce sa profession de manière libérale, il engage directement sa responsabilité.

Dans tous les cas, le moniteur d’équitation, qu’il dispense sa leçon en manège ou qu’il accompagne des cavaliers lors d’une promenade, est tenu, du fait de son contrat conclu avec les cavaliers à une obligation de prudence et de sécurité (1).

 

Parallèlement à cette obligation de sécurité et de prudence, le moniteur d’équitation est tenu à une obligation d’assurance (2).

 

1.

Tout comme l’organisateur de manifestations sportives, cette obligation est une obligation de moyens et non de résultat.

Le cavalier qui souhaite mettre en œuvre la responsabilité du moniteur doit prouver que celui-ci a commis une faute, qu’il a lui-même subi un dommage et que son dommage a été occasionné par la faute du moniteur.

 

Cette obligation de sécurité et de prudence peut se diviser en deux grandes catégories : une obligation d’adapter la leçon par rapport au niveau du cavalier (a) et une obligation d’encadrer strictement le cours (b).

 

a.L’obligation d’adapter la leçon au niveau du cavalier

Comme nous l’avons exposé précédemment, le moniteur d’équitation est tenu à une obligation de moyens de sécurité et de prudence du fait du contrat le liant au cavalier.

La Jurisprudence a précisé la définition de cette obligation pesant sur le moniteur.

Dans plusieurs décisions, il a été jugé que de cette obligation résultait un devoir pour le moniteur d’adapter la leçon aux cavaliers de manière générale.

En effet, tous les cavaliers n’ont pas le même niveau et par exemple le fait pour le moniteur de dispenser un cours pour un cavalier de niveau 6 à un débutant serait un manquement de son obligation de prudence.

Le moniteur doit également vérifier que le terrain est adapté au niveau du cavalier (Cour d’appel de Rennes, 7e chambre, 8 novembre 2006).

 

Plus généralement, les exercices proposés pendant la leçon et le comportement connu de la monture doivent correspondre au niveau du cavalier.

Ainsi, le fait de mettre à disposition d’un cavalier, un cheval agressif et dangereux alors qu’il n’était que débutant permet au cavalier d’engager la responsabilité du moniteur fondée sur un manquement à son obligation de sécurité et de prudence (Cour d’appel de Lyon, Chambre civile 1, 19 janvier 2006).

Il faut noter que même si le niveau de galop du cavalier est élevé, le moniteur ou le centre peut facilement engager sa responsabilité en cas d’accident.

Cette obligation de sécurité et de prudence est accrue lorsque le moniteur dispense un cours à des enfants, et ce quel que soit son niveau de galop.

Le moniteur doit mettre à disposition des enfants des « chevaux doux et patients » (Cour d’appel de Paris, 29 mai 2005).

L’obligation d’adapter la leçon au niveau du cavalier est valable aussi en promenade et non uniquement en manège.

Au cours des promenades, le moniteur doit adapter la cadence et la difficulté des chemins empruntés au niveau des cavaliers dont il est responsable.

 

Il sera donc constaté que la responsabilité des moniteurs de centre équestre être très aisément engagée alors même qu’il s’agit parfois d’erreurs commises par les cavaliers eux-mêmes, qui, par exemple, refusent de prendre la monture proposée par le moniteur.

Dans ce cas, le moniteur doit se comporter comme un instructeur et de ce fait ne pas céder devant les « caprices » de ses élèves.

Il doit veiller à tout moment à ne commettre aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité ni celle du centre équestre dans lequel il est salarié.

Parallèlement à cette obligation d’adapter la leçon au cavalier, le moniteur a l’obligation d’encadrer lors des leçons ou pendant les promenades, sous peine de voir sa responsabilité engagée par un cavalier victime d’une chute.

 

b.L’obligation d’encadrement lors des leçons d’équitation ou des promenades

Toujours comprise dans son obligation générale de sécurité et de prudence dégagée par la Jurisprudence, le moniteur a également l’obligation d’encadrer strictement ses leçons ou les promenades qu’il organise avec les cavaliers. Il s’agit également d’une obligation de moyens.

Tout d’abord, il est obligatoire que le moniteur qui encadre un cours ou une promenade soit diplômé (Cour d’appel de Poitiers, 20 novembre 2011).

Ainsi, la Cour d’appel de Rennes a pu considérer : « qu’en confiant son élève, inapte à la pratique de l’équitation, à une personne sans qualification d’enseignement, le centre équestre a manqué à son obligation de moyens et doit donc être déclaré responsable des conséquences dommageables de l’accident » (Cour d’appel de Rennes, 7e chambre, 6 décembre 2006).

Il faut donc déduire de cet arrêt que, si un accident se produit lors d’une leçon ou d’une promenade encadrée par un moniteur qui ne dispose pas des diplômes requis pour enseigner, la victime peut engager la responsabilité du centre équestre sur le fondement de l’article 1242 al 5 du Code civil, précédemment cité.

 

De plus, le moniteur a l’obligation de veiller à ce que les cavaliers portent leur bombe, que ce soit en promenade ou lors de leçons dispensées en manège, car il s’agit d’un élément de sécurité (Cour d’appel de Rouen, 6 mai 2004).

 

L’obligation d’encadrement comporte également l’obligation de vérifier que :

-le matériel mis à disposition des cavaliers pour les chevaux est en bon état, et bien posé par les cavaliers (Cour d’appel de Caen, 8 avril 2008) ;

-les installations présentes dans le manège sont sécurisées et ne peuvent « en aucun cas, venir aggraver le risque normal de chute inhérent à la pratique de ce sport » (Tribunal de Grande Instance de Brest, 15 décembre 2004).

Qu’il s’agisse d’un défaut d’encadrement ou d’une inadaptation de la leçon au niveau du cavalier, la responsabilité du moniteur ou du centre équestre est très souvent mise en cause.

Les juges retiennent fréquemment le manquement à l’obligation de sécurité et de prudence, permettant à la victime d’un accident d’être indemnisée.

 

C’est pour cette raison que la loi oblige les centres équestres et moniteurs d’équitation à être assurés.

 

  1. L’obligation d’assurance du centre équestre

Le législateur a imposé au centre équestre, et par conséquent, au moniteur d’équitation une obligation de souscrire une assurance (a), mais également d’informer les cavaliers sur la possibilité de contracter directement une assurance individuelle (b).

 

a.L’obligation de souscrire une assurance

Au regard du danger prévisible de la pratique de l’équitation, la loi a fixé une obligation de s’assurer pour les centres équestres.

 

L’article L.321-1 alinéa 1er du Code du sport prévoit en effet que : « Les associations, les sociétés et les fédérations sportives souscrivent pour l’exercice de leur activité des garanties d’assurance couvrant leur responsabilité civile, celle de leurs préposés salariés ou bénévoles et des celles de pratiquants du sport. Les licenciés et les pratiquants sont considérés comme des tiers entre eux ».

Ainsi, les centres équestres doivent s’assurer pour couvrir leur responsabilité en cas de faute, ou de dommage causé aux cavaliers par eux même mais aussi du fait de leurs préposés, c’est-à-dire leurs salariés, tels que le moniteur salarié.

 

Les garanties d’assurance couvriront également les dommages causés par les cavaliers entre eux.

Par exemple, si lors d’un entraînement un cavalier blesse un autre cavalier, l’assurance du centre équestre prendra en charge l’indemnisation du cavalier victime car ces cavaliers sont considérés comme des tiers entre eux.

En conséquence, la responsabilité des cavaliers les uns envers les autres est couverte par cette assurance obligatoire.

 

L’article L.321-1 du Code du sport fixe la sanction à laquelle s’exposent les centres équestres ne contractant pas d’assurance : « Le fait, pour le responsable d’une association sportive, de ne pas souscrire les garanties d’assurance dans les conditions prévues à l’article L.321-1 est puni de six mois d’emprisonnement et d’une amende de 7 500 euros ».

Il s’agit d’une sanction pénale qui peut paraître sévère, mais qui permet de prévenir les cas où les centres équestres n’ont pas conclu de contrat d’assurance et se retrouvent dans une situation où leur responsabilité est mise en jeu.

Dans ce dernier cas, les indemnisations sont susceptibles d’être beaucoup plus importantes que les primes mensuelles d’assurance.

 

En plus de l’obligation de s’assurer pour couvrir leur responsabilité civile, ou celle de leurs salariés ou des dommages causés par les cavaliers entre eux, les centres équestres doivent informer les cavaliers sur la possibilité de souscrire une assurance individuelle couvrant les dommages corporels causés par la pratique du sport.

 

b.L’obligation d’informer les cavaliers de leur possibilité de s’assurer individuellement

La loi impose au centre équestre d’informer les cavaliers sur la possibilité de souscrire personnellement à une assurance complémentaire.

En effet, selon l’article L.321-4 du Code du sport : « Les associations et les fédérations sportives sont tenues d’informer leurs adhérents de l’intérêt que présente la souscription d’un contrat d’assurance de personnes couvrant les dommages corporels auxquels leur pratique sportive peut les exposer ».

Cette disposition correspond à une obligation de conseil à la charge du centre équestre qui doit informer les nouveaux cavaliers des avantages que présente l’adhésion à ces contrats d’assurance.

Elle permet notamment au cavalier qui se blesse d’être indemnisé.

Comme le prévoit l’article L321-5 du même Code : « Les fédérations sportives agréées peuvent conclure des contrats collectifs d’assurance visant à garantir les associations affiliées et leurs licenciés... »

 

En outre, l’article L321-6 du même Code précise que : « Lorsque la fédération agréée à laquelle est affiliée l’association sportive propose aux membres de celle-ci, qui sollicitent la délivrance d’une licence, d’adhérer simultanément au contrat collectif d’assurance de personnes qu’elle a souscrit, elle est tenue :

1° De formuler cette proposition dans un document, distinct ou non de la demande de licence, qui mentionne le prix de l’adhésion, précise qu’elle n’est pas obligatoire et indique que l’adhérent au contrat collectif peut en outre souscrire des garanties individuelles complémentaires ;

2° De joindre à ce document une notice établie par l’assureur conformément au deuxième alinéa de l’article L. 141-4 du Code des assurances. »

 

En conséquence, au moment de l’adhésion, le centre équestre doit informer le cavalier qu’il peut :

  • souscrire ou non au contrat collectif d’assurance de l’association, et le cas échéant, souscrire une assurance complémentaire,
  • souscrire une assurance auprès d’une autre compagnie

et que, dans tous les cas, l’assurance est facultative.

 

 

En effet, la Jurisprudence, en s’appuyant sur l’obligation d’information dégagée par le législateur, a retenu la responsabilité d’un centre équestre qui n’avait pas informé une cavalière sur la possibilité de prendre une telle assurance et qui s’était blessée lors d’une leçon.

En l’espèce, la responsabilité du centre équestre n’avait pu être engagée sur le fondement d’un manquement à l’obligation de sécurité et de prudence, car la cavalière n’avait pas réussi à prouver la faute de la monitrice.

 

Par ailleurs, il a été considéré que le centre équestre « a manqué à son devoir d’information, entraînant pour Madame M. une perte de chance qui doit être fixée à 90 %. En effet, si Madame M. avait reçu l’information concernée, elle aurait très certainement souscrit une assurance complémentaire, s’agissant d’une personne exerçant une profession de cadre, donc nécessairement avisée, informée et consciente de la nécessité de souscrire des garanties complémentaires » (Cour d’appel de Nancy, Chambre civile 1, 8 mars 2005).

En l’espèce, la Cour a fait une application stricte du devoir d’information du centre équestre concernant la faculté de souscrire une assurance complémentaire individuelle en prenant en compte la profession de la cavalière qui, étant cadre, en aurait très certainement souscrit une.

 

En conséquence, le cavalier peut, lors de son adhésion, soit souscrire à l’assurance collective couvrant les dommages corporels auxquels sont exposés les cavaliers par la pratique de ce sport, et le cas échéant, souscrire une assurance complémentaire, soit prendre une assurance individuelle auprès d’un autre assureur apportant des garanties identiques, soit enfin ne souscrire à aucune assurance.

En revanche, le centre équestre a toujours l’obligation d’informer le cavalier de la possibilité de souscrire à une assurance complémentaire.

Aucune sanction pénale n’est encourue pour le centre équestre dans ce cas mais la responsabilité civile du moniteur d’équitation ou du centre équestre est souvent retenue par les Tribunaux.

 

De son côté, le troisième acteur, le loueur d’équidés, est plus protégé.

 

C.Un régime de responsabilité légèrement assoupli pour le loueur d’équidés

Un loueur d’équidés est une personne qui loue un cheval à une autre personne, pour une durée déterminée, par exemple pour une heure ou une journée.

La clientèle du loueur d’équidés est large et peut comprendre par exemple des cavaliers habituels mais également des familles qui souhaitent faire une randonnée.

A la différence du moniteur d’équitation, le loueur d’équidés n’accompagne pas les locataires et ne donne pas de leçons pour monter les chevaux.

 

Contrairement au moniteur d’équitation qui doit être diplômé pour enseigner, le loueur d’équidés peut exercer son activité de façon indépendante, en société ou en association et sans obligation de diplôme.

Le contrat conclu entre le loueur d’équidés et le « cavalier » est un contrat de louage de biens meubles prévu aux articles 1708 et suivants du Code civil.

 

L’article 1709 du Code civil dispose que : « Le louage des choses est un contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer ».

Le loueur met à disposition d’une personne un cheval pour une durée déterminée.

 

Le loueur d’équidés est soumis à un régime de responsabilité assoupli car il n’est pas présent comme le moniteur d’équitation pendant la promenade, et n’encadre donc pas cette promenade.

 

Cependant, la Jurisprudence a dégagé quelques obligations à sa charge même si les juges du fond font une différence entre le loueur d’équidés et le moniteur d’équitation.

 

En effet, ils estiment que : « à la différence du loueur de chevaux, fondé à consister que ses clients livrés à eux-mêmes et libres de choisir leur allure comme leur itinéraire sont de véritables cavaliers acceptant sciemment de courir les risques d’un sport dangereux, l’entrepreneur de promenades équestres s’adresse, au contraire à des clients qui peuvent tout ignorer de l’équitation et rechercher seulement le divertissement d’un parcours à dos de cheval sur l’itinéraire proposé par les préposés qui les accompagnent » (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 29 avril 2008).

 

Cet arrêt montre que les loueurs d’équidés ne peuvent pas être responsables du trajet choisi par les cavaliers qui louent les chevaux, et des problèmes subis lors de leur promenade.

 

Ainsi, le fait que le cheval s’emballe au cours d’une promenade sans qu’il n’ait été possible d’en connaître la cause ne permet pas de prouver que le loueur d’équidés a manqué à son obligation de sécurité (Cour d’appel de Chambéry, 26 juin 2007).

 

En revanche, le loueur d’équidés a l’obligation de vérifier l’état du matériel mis à disposition des cavaliers et doit, en outre, vérifier que les cavaliers au moment de partir en promenade, portent les bombes5 (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 30 avril 2013).

 

Le régime de responsabilité du loueur d’équidés est donc plus souple que celui du moniteur d’équitation.

En effet, le loueur d’équidés est principalement tenu à une obligation de sécurité au moment du départ et en fin de promenade, et au devoir de vérifier le matériel et de ne pas donner des chevaux dangereux.

 

En revanche, pendant la promenade, il n’est pas présent et ne peut donc bien entendu être tenu responsable d’un défaut d’encadrement.

 

Nous avons évoqué les différents régimes de responsabilité contractuelle, liant le cavalier au moniteur d’équitation mais aussi à l’organisateur de manifestations sportives ou encore au loueur d’équidés.

Le cavalier peut engager la responsabilité de ces acteurs dès lors qu’ils ont manqué à leur obligation de sécurité et de prudence.

Cependant, pour tenter d’échapper à leur responsabilité, ces différents acteurs peuvent faire valoir une cause d’exonération.

 

 

D.Les causes exonératoires de responsabilité de l’ensemble des acteurs

Au titre du droit de la responsabilité civile, il existe trois causes d’exonération :

  • La faute de la victime (1)
  • Le fait d’un tiers (2)
  • La force majeure (3)

 

1.La responsabilité ne peut être engagée lorsque la victime de l’accident a commis une faute

Comme il l’a été précédemment exposé, la responsabilité des acteurs équestres est souvent engagée et très peu exonérée même lorsque la victime aurait commis une faute.

En théorie, la faute de la victime devrait être retenue comme une cause d’exonération de responsabilité pour la personne mise en cause.

Cependant, en pratique, il est très rare que la Jurisprudence exonère totalement un responsable dans le domaine équestre.

Pour que la faute de la victime soit retenue comme une cause d’exonération de responsabilité, il faut qu’elle ait concouru à la réalisation du dommage.

Pour que l’exonération du responsable soit totale, il faut que la faute de la victime présente les caractères de la force majeure, c’est-à-dire que la faute soit cumulativement imprévisible, extérieure, et irrésistible.

 

 

En matière contractuelle, l’imprévisibilité s’apprécie au jour de la conclusion du contrat, le débiteur ne s’étant engagé qu’en fonction de ce qui était prévisible à cette date.

Tout s’ordonne, dans le domaine contractuel, autour des prévisions des parties et des attentes légitimes du créancier : il faut que l’événement-obstacle crée une difficulté d’exécution dont le créancier ne pouvait raisonnablement espérer la prise en charge par le débiteur.

 

L’extériorité s’entend d’un événement indépendant de la volonté de celui qui doit exécuter le contrat et rendant impossible l’exécution du contrat.

 

L’irrésistibilité implique, quant à elle, une appréciation du comportement de l’individu « pendant la réalisation » de l’événement.

Il faut que la personne concernée ait été dans l’impossibilité d’agir autrement qu’elle l’a fait.

Il faut également que l’événement soit « inévitable » ou « insurmontable » et la laisse impuissante.

La jurisprudence recherche le plus souvent si l’événement a engendré ou non pour le sujet une impossibilité d’exécuter l’obligation ou d’éviter la réalisation du dommage et en vérifiant si un individu moyen, placé dans les mêmes circonstances, aurait pu résister et surmonter l’obstacle.

L’évolution récente de la jurisprudence tend d’ailleurs à faire de l’événement « irrésistible » le critère sinon unique, du moins central de la force majeure.

Cependant, la Jurisprudence a tendance à exonérer partiellement le responsable en cas de faute de la victime dans le domaine équestre.

Ainsi, une élève monitrice ayant proposé à un cavalier de changer de monture lors d’une leçon, et que celui-ci s’y est refusé, engage sa responsable pour manquement à son obligation de sécurité et de prudence.

En revanche, elle partage sa responsabilité avec le cavalier victime d’une chute, car il avait souhaité garder le cheval sur contre-ordre de sa monitrice (Cour d’appel de Lyon, 1er chambre civile, 19 janvier 2006).

Dans cette décision, on aurait pu penser que l’élève monitrice aurait pu être totalement exonérée de sa responsabilité, mails il apparaît donc qu’elle aurait dû insister envers le cavalier pour qu’il ne prenne pas cette monture.

La faute de la victime ne l’a exonéré que partiellement de sa responsabilité.

 

Aussi rare qu’elle soit admise, la faute de la victime est une des principales causes d’exonération de la responsabilité des acteurs évoqués avec le fait d’un tiers et la force majeure.

 

2.Le responsable peut être exonéré par le fait d’un tiers

Pour être exonéré de sa responsabilité, l’auteur du manquement à son obligation de moyens peut invoquer le fait qu’il a manqué à son obligation à cause d’un tiers.

Cependant, il faut pour que la personne tenue responsable puisse être exonérée que le fait du tiers présente les caractéristiques de la force majeure, c’est-à-dire soit extérieur, imprévisible et irrésistible, de telle sorte que le responsable ne pouvait pas empêcher que le dommage ne se produise.

En principe, peu importe que le tiers ait commis une faute ou non, dès lors qu’il a provoqué le dommage, il pourra être retenu responsable, et dans ce cas, il s’agira d’une exonération totale.

Alors que si le tiers a simplement contribué à la production du dommage, l’exonération du responsable ne sera que partielle (Cour de cassation, 2e chambre civile, 15 janvier 1960).

 

En matière de sport équestre, le fait d’un tiers est très rarement admis, voire quasiment jamais.

D’ailleurs, il sera noté que le centre équestre ne peut jamais échapper à sa responsabilité en invoquant le fait de son préposé, c’est-à-dire du fait du moniteur salarié (Chambre des requêtes, 22 janvier 1963).

 

A côté de ces deux causes d’exonération, le responsable peut tenter de s’exonérer en invoquant la force majeure.

 

 

3. La force majeure est un événement peu admis pour l’exonération de la responsabilité

La force majeure est un événement qui nécessite la réunion de trois conditions détaillées ci-avant, à savoir un caractère extérieur, imprévisible et irrésistible.

 

L’événement permet d’exonérer le responsable d’un dommage dès lors que cette personne n’a pas pu empêcher le déroulement de cet événement.

 

Cependant, ce critère d’exonération de responsabilité n’est que très peu admis par la Jurisprudence voir quasiment jamais admis.

En effet, par exemple, le fait qu’un chien vienne effrayer les chevaux lors d’une promenade et que ces derniers s’enfuient en faisant tomber leur cavalier ne permet pas d’exonérer le loueur d’équidés de sa responsabilité car il devait mettre à disposition des cavaliers des chevaux peu craintifs6 (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 10e chambre, 30 avril 2013).

Ainsi, l’élément extérieur de la force majeure était caractérisé car le loueur d’équidés ne pouvait pas prévoir que des chiens allaient venir perturber la promenade des cavaliers, mais il aurait dû prévoir que les chevaux s’affoleraient, les caractères d’imprévisibilité et d’irrésistibilité ne sont pas réunis.

De la même manière, le fait qu’un obstacle s’écroule lors d’une compétition sportive faisant tomber le cheval, et chuter le cavalier n’est pas un événement de force majeure permettant à l’organisateur de cette manifestation sportive d’être exonéré de sa responsabilité car il doit mettre à disposition des cavaliers du matériel entretenu en vertu de son obligation de sécurité et de prudence.

 

La responsabilité de ces trois principaux acteurs au sein d’un contrat est très souvent engagée par les cavaliers accidentés, et très rarement exonérée, tout au plus partiellement.

Il convient à ce stade d’étudier les cas plus fréquents où des acteurs équestres sont responsables en dehors de tout contrat.

 

II.Les cas de responsabilité des acteurs équestres en dehors d’un contrat

Ainsi qu’il l’a été exposé précédemment, lorsqu’un accident survient, la victime doit d’abord rechercher si celui-ci résulte d’un manquement commis par une personne avec laquelle elle serait liée par un contrat.

Si son dommage ne peut trouver son origine dans l’inexécution d’une obligation contractuelle ou la faute contractuelle d’une personne, la victime devra identifier l’auteur de son dommage et mettre en cause sa responsabilité civile délictuelle.

En effet, l’article 1240 du Code civil dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Cette responsabilité délictuelle peut être personnelle si la personne cause directement le dommage.

 

Elle peut également être retenue lorsque le dommage a été occasionné par une chose ou un animal, ou le fait d’un de ses préposés dont une personne doit répondre.

En effet, l’article 1242 du Code civil prévoit que :

« On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.

...

Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ;

 

En l’occurrence, il sera précisé que :

  • Le cavalier est responsable du dommage causé à autrui hormis dans le cadre d’une compétition (A)
  • L’organisateur de manifestations sportives est responsable envers les spectateurs et les tiers (B).

Cependant, comme nous l’avons vu précédemment, ces acteurs peuvent invoquer une cause permettant de se voir exonérer de leur responsabilité (C).

 

A.Le cavalier est responsable du dommage causé à autrui hormis dans le cadre d’une compétition

En principe, lorsqu’un cavalier cause un dommage à un autre cavalier, par l’intermédiaire de sa monture, le cavalier victime peut engager la responsabilité du cavalier fautif, car ce dernier est responsable des faits de sa monture (1).

Cependant, lors d’une compétition, les règles changent et le cavalier fautif ne pourra plus voir sa responsabilité engagée en cas de dommage causé par sa monture car le cavalier victime a accepté les risques liés à cette compétition (2).

 

1.Le cavalier est responsable de sa monture

La loi considère que le cavalier est un gardien du cheval qu’il monte, de ce fait, il en est le principal responsable (a).

 

Cependant, le jockey est un cavalier mais lors d’une compétition, il ne sera pas considéré comme le gardien du cheval, ce sera le propriétaire qui sera considéré comme tel.

 

Il s’agit d’une exception au principe de la garde attribuée au cavalier (b).

 

a.Le principe : le gardien du cheval est toujours responsable

La notion juridique de garde n’est pas si facile à appréhender.

Les critères de référence pour savoir si une personne est gardienne d’une chose ont été dégagés par la Jurisprudence.

En l’espèce, la garde est caractérisée par l’usage, le contrôle et la direction d’une chose (Chambres réunies, 2 décembre 1941).

En réalité, un cavalier est gardien d’une chose lorsqu’il en a l’usage, le contrôle et la direction, au même titre que l’automobiliste est gardien de sa voiture.

Il s’agit d’un régime de responsabilité du fait des choses, ou dans le cas d’un cavalier, du fait des animaux.

Cette situation entre dans le champ d’application des deux articles dans le Code civil prévoyant les principes de responsabilité du fait des choses et du fait des animaux.

 

L’article 1242 al 1 du Code civil7 pose un principe général de responsabilité du fait des choses que l’on a sous sa garde.

 

L’article 1243 du Code civil dispose que : « Le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal fût sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé ».

 

Il convient cependant de préciser que le propriétaire d’un cheval n’en est pas toujours le gardien.

Par exemple, si le propriétaire d’un cheval prête sa monture à un ami pour une promenade et que le cheval blesse une personne d’un coup de sabot, l’ami sera retenu comme gardien et donc responsable de ce dommage, et non le propriétaire.

Ainsi pèse-t-il sur le propriétaire une présomption simple. Il faut que le propriétaire prouve le transfert de la garde de son cheval à son ami (Cour de cassation, 2e chambre civile, 1970).

 

Dans le cadre de la responsabilité d’un gardien, la victime doit prouver que celui-ci a commis un fait dommageable, qu’elle a subi un dommage et qu’il existe un lien de causalité entre ce fait dommageable commis par le cheval et son dommage.

L’action du cheval peut constituer un fait dommageable permettant à la victime d’engager la responsabilité du cavalier qui n’a pas su tenir sa monture.

 

En revanche, il l’a déjà été précisé, si un cheval, monté par un cavalier, donne un coup à un autre cavalier, lors d’une leçon, le cavalier victime peut se retourner contre le cavalier du cheval responsable du dommage, mais ce dernier sera couvert par l’assurance du centre équestre, qui est assuré pour les dommages causés par les cavaliers qui sont considérés comme tiers entre eux.

Il convient de préciser qu’outre le cavalier, d’autres personnes peuvent être tenues pour responsables.

En effet, il n’est pas indispensable de monter le cheval pour être responsable en tant que gardien.

Par exemple, le transporteur (Cour de cassation, 2e chambre civile, 3 juillet 1963), ou encore le maréchal-ferrant (Cour de cassation, 2e chambre civile, 4 octobre 1962) peuvent voir leur responsabilité engagée sur le fondement de la notion de garde.

 

En tout état de cause, le cavalier est considéré comme gardien du cheval qu’il monte. Il peut s’agir du propriétaire lui-même ou bien d’un tiers.

Pourtant, ce régime de responsabilité de gardien n’est pas applicable au jockey lors d’une compétition sportive.

 

b.L’exception : le propriétaire est toujours responsable en présence d’un jockey

Comme il vient de l’être exposé, celui qui a la garde, l’usage et le contrôle d’un animal en a la garde.

Aussi, un dommage causé par un animal engage la responsabilité de son gardien.

Le jockey devrait donc être responsable de son cheval lors des compétitions.

Cependant, le jockey est considéré, du fait de son statut, comme le préposé du propriétaire du cheval, en courant à son nom et pour son compte.

Les qualités de préposé et de gardien ont été considérées comme incompatibles par la Jurisprudence (Cour de cassation, 2e chambre civile, 27 février 1929).

 

L’article 1242 al 5 du Code civil énonce que sont responsables : « Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ».

Le propriétaire du cheval demeure responsable quand celui qui se sert de l’animal est son préposé, et reste gardien de celui-ci.

Il s’agit d’un régime protecteur pour le jockey, qui, si son cheval cause un dommage à l’un de ses concurrents ou à un tiers, ne pourra pas être considéré comme gardien et ne pourra pas voir sa responsabilité engagée.

 

Cependant, le jockey n’est pas totalement exonéré de sa responsabilité, en ce sens, qu’il demeure responsable dans le cadre de l’article 1240 du Code civil, c’est-à-dire qu’il est responsable s’il a commis une erreur intentionnelle ou particulièrement grave.

Dans ce cas, il appartiendra à la victime de prouver que le jockey a commis cette faute grave, mais aussi qu’elle a subi un dommage et de prouver le lien de causalité entre les deux.

Le cavalier est responsable de sa monture car il est considéré comme gardien, à l’exclusion du jockey qui est considéré comme un préposé et laisse le propriétaire seul gardien du cheval.

En conséquence, la victime doit engager la responsabilité du gardien du cheval lui ayant occasionné un dommage.

Cependant, il existe un régime dérogatoire lors des compétitions pour les cavaliers entre eux : l’acceptation des risques par ces derniers.

 

2.Un régime dérogatoire : l’acceptation des risques par les cavaliers en compétition

La compétition équestre est un contexte différent des entraînements ou des promenades et se voit donc appliquer un régime différent.

Lors des entraînements, promenades, leçons… le cavalier (le plus souvent) est responsable des dommages causés à autrui par son cheval, mais lors des compétitions, il ne sera pas responsable des dommages causés par son cheval à un autre cavalier.

En effet, après une longue fluctuation jurisprudentielle, le législateur a décidé dans une loi du 12 mars 2012 d’insérer un article L.321-3-1 du Code du sport qui énonce que : « Les participants ne peuvent être tenus pour responsables des dommages matériels causés à un autre pratiquant par le fait d‘une chose qu’ils ont sous leur garde, au sens du premier alinéa de l’article 1384 (devenu 1242du Code civil, à l’occasion de l’exercice d’une pratique sportive ou d’un entraînement en vue de cette manifestation sportive sur un lieu réservé de manière permanente ou temporaire à cette pratique ».

La loi a instauré, lors des compétitions de sports tels que l’équitation ou d’autres sports faisant intervenir une chose notamment comme le rugby ou le football, la théorie de l’acceptation des risques.

 

Cette théorie avait tout d’abord était consacrée par la Jurisprudence (Cour de cassation, 2e chambre civile, 8 octobre 1975), pour être cantonnée ensuite aux seules compétitions sportives (Cour de cassation, 2e chambre civile, 4 juillet 2002).

Cette théorie prévoit clairement que le gardien dont la chose cause un dommage matériel à un autre participant pendant la compétition ne peut pas être tenu responsable car le participant victime a accepté les risques liés au sport pratiqué.

 

Du fait de l’acceptation de ces risques, il ne peut pas demander réparation des dommages matériels sur le fondement de l’article 1242 al 1 du Code civil.

La Jurisprudence avait par la suite opéré un revirement (Cour de cassation, 2e chambre civile, 4 novembre 2010) et avait affirmé que la théorie de l’acceptation des risques ne pouvait plus être mise en œuvre pour exonérer le gardien d’une chose lors d’une compétition sportive.

Dans ces conditions, le cavalier était responsable sur le fondement de la notion de garde des dommages causés par sa monture au cours d’une compétition, à un autre cavalier sauf à prouver qu’il peut être exonéré par une faute de la victime, par le fait d’un tiers ou par la force majeure.

Cet arrêt était venu placer les cavaliers participants aux compétitions dans une situation d’insécurité car les accidents aux cours de ces événements sont relativement fréquents.

C’est pour cette raison que le législateur a estimé bon d’intervenir et d’insérer l’article L321-3-1 précité dans le Code du sport.

La théorie de l’acceptation des risques lors des compétitions et pendant les entraînements juste avant la compétition est donc légalement consacrée.

 

Néanmoins, il sera précisé que cette exonération ne s’applique que pour les dommages matériels causés à la victime et non les dommages corporels qui restent indemnisés.

Ainsi, si le cavalier victime fait une chute par la faute d’un autre cavalier, il pourra toujours obtenir réparation de son dommage corporel, alors que le cheval fait une chute et se blesse, le cavalier victime ne pourra pas en obtenir réparation car la théorie de l’acceptation des risques fait supporter aux cavaliers les risques liés à la compétition.

 

De plus, cette théorie ne vaut que pour les risques normaux liés à la compétition, et ne vaut pas pour les risques anormaux.

Ainsi, il a été estimé que « le risque de ruade d’un cheval est un risque courant, connu et admis par tous les cavaliers, et spécialement en situation de course hippique d’endurance » (Tribunal de Grande Instance de Carcassonne, 25 juin 2009).

En l’espèce, il s’agissait d’un risque normal qui prive le cavalier victime de la réparation du dommage causé à son cheval.

Si le cavalier du cheval fautif n’a pas respecté les règles de la compétition, il demeure responsable du dommage causé par sa monture.

Le cavalier victime doit alors prouver la faute du cavalier, le dommage qu’il a subi et le lien de causalité entre les deux.

La loi du 12 mars 2012 a uniquement modifié le Code du sport, et non les autres codes spécifiques au domaine de la compétition équestre.

En conséquence, les compétitions organisées par la Fédération Française d’Equitation, par la Fédération du Polo sont soumises à la théorie de l’acceptation des risques, car elles sont présentes dans le Code du Sport, alors que les courses de chevaux au trot ou au galop, n’y sont pas soumises8.

 

Cette théorie a donc une étendue relative puisqu’elle prévoit l’exonération du gardien uniquement lors de la compétition sportive, au seul dommage matériel et ne s’applique pas à tous les types de compétitions.

Le plus souvent, le gardien reste donc responsable de sa monture, mais il n’est pas l’unique responsable, au titre de la responsabilité délictuelle, des dommages causés.

L’organisateur de manifestations sportives est lui aussi responsable, pendant le déroulement de ces événements envers les spectateurs et les tiers.

 

B.La mise en œuvre de la responsabilité de l’organisateur des manifestations sportives par les spectateurs non payants et les tiers

L’organisateur engage sa responsabilité délictuelle à l’égard des spectateurs d’une manifestation équestre gratuite ou encore à l’égard des tiers.

En effet, lors de la survenance d’un dommage à l’égard des spectateurs dans une manifestation payante et des participants, la responsabilité contractuelle de l’organisateur doit être mise en œuvre au regard du contrat qui lie les premiers au deuxième.

A cette occasion, l’organisateur est tenu envers les participants et les spectateurs payants « d’une obligation de sécurité, de prudence, de surveillance, d’entretien et de protection dans l’aménagement, l’organisation et le fonctionnement de son établissement » (Cour d’appel de Paris, 8e Chambre, Section A, 8 février 2005). Il est précisé à nouveau qu’il s’agit d’une obligation de moyen.

Dans ces conditions, le spectateur doit, pour engager la responsabilité de l’organisateur, prouver sa faute de celui-ci, le dommage subi et le lien de causalité entre les deux.

 

En revanche, lorsqu’il s’agit d’un événement non payant et en l’absence de tout contrat, l’organisateur de manifestations sportives peut alors engager sa responsabilité délictuelle pour les dommages causés aux spectateurs et aux tiers, qui peuvent être, par exemple, des voisins.

 

L’organisateur peut engager sa responsabilité non seulement s’il a commis une faute (1), mais également en l’absence de toute faute (2).

 

1.La responsabilité pour faute de l’organisateur de manifestations sportives

En cas de faute commise par l’organisateur de manifestations sportives, celui-ci engager sa responsabilité délictuelle du fait personnel visée à l’article 1240 du Code civil et exposée précédemment.

Dans ce cas, la victime doit prouver la faute de l’organisateur, le dommage subi et le lien de causalité entre cette faute et le dommage.

La distinction entre la responsabilité pour faute et la responsabilité sans faute fait naître deux régimes différents.

 

Dans le cadre d’une responsabilité pour faute, l’organisateur sera responsable de sa faute personnelle alors que la responsabilité sans faute s’applique lorsque le dommage est causé par une chose, un animal ou un préposé dont répond l’organisateur.

Si l’organisateur commet une faute intentionnelle, il s’agit d’une faute de commission telle que, par exemple, le fait pour l’organisateur de ne pas abandonner ou mettre fin à l’événement malgré de mauvaises conditions climatiques pouvant causer un accident à un spectateur.

 

La Jurisprudence estime en l’espèce que l’organisateur de manifestations sportives a commis une faute, car il n’aurait pas dû maintenir l’événement dans ces conditions.

 

Dans certains cas, l’organisateur de manifestations sportives cause un dommage en n’agissant pas, il s’agit alors d’une faute d’omission susceptible d’engager sa responsabilité.

Ainsi, le fait de ne pas installer d’éléments de protection du public, qui serait à l’origine d’un dommage sur un spectateur, peut entraîner la responsabilité de l’organisateur de manifestations sportives, et plus particulièrement, la non-délimitation de la zone de compétition avec celle des spectateurs.

En l’occurrence, c’est l’organisateur lui-même qui a commis une faute.

Dans certaines situations, il ne commet pas personnellement de faute.

 

2.La responsabilité sans faute de l’organisateur de manifestations sportives

Comme nous l’avons énoncé précédemment, la responsabilité sans faute d’une personne peut être engagée car elle est responsable du fait des choses (a), mais aussi du fait d’autrui (b).

 

a.L’organisateur est tenu à une obligation d’entretenir les infrastructures

La responsabilité du fait des choses est énoncée à l’article 1242 al 1 du Code civil précité qui désigne comme responsable le gardien de la chose.

La Jurisprudence avait consacré cette théorie dans un arrêt fondateur (Cour de cassation, 1re chambre civile, 16 juin 1896, Teffaine).

C’est la situation qu’il convient d’appliquer à l’organisateur de manifestations sportives qui est responsable des infrastructures mises à dispositions des spectateurs.

 

L’article 1244 du Code civil va même plus loin, et énonce que : « Le propriétaire d’un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par une suite de défaut d’entretien ou par le vice de sa construction ».

Si l’organisateur de manifestations sportives n’entretient pas les infrastructures servant lors de la compétition aux spectateurs telles que les tribunes, les bâtiments… il peut être tenu responsable, dès lors qu’un accident a été engendré par ces dernières.

Ainsi, un organisateur de courses de P.M.U a été retenu responsable du dommage causé par un mirador non fixé au sol, dans lequel des enfants étaient montés et s’étaient fracturé le bras car cette infrastructure s’est renversée (Cour d’appel de Lyon, 6e chambre civile, 24 novembre 2005).

Dans ce cas, le spectateur doit démontrer que l’organisateur avait la garde de ces infrastructures et qu’il devait les entretenir.

 

En plus d’être responsable des infrastructures, l’organisateur est aussi responsable des fautes commises par son personnel.

 

b.L’organisateur est responsable de son personnel

Au même titre que le centre équestre est responsable des dommages causés par son moniteur salarié, l’organisateur de manifestations sportives est responsable de son personnel en vertu de l’article 1242 al 5 du Code civil précité.

Pour rappel, cet article énonce que sont responsables : « Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et leurs préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ».

La faute d’un salarié de l’organisateur de manifestations sportives causant un dommage à un spectateur engage la responsabilité de cet organisateur.

 

Il convient néanmoins d’opérer une distinction :

  • Soit le salarié a commis une faute dans le cadre de sa mission, et dans ce cas, c’est l’organisateur qui est responsable et devra réparer le préjudice causé au spectateur victime (Assemblée Plénière, 25 février 2000, Costedoat9).
  • Soit le salarié a outrepassé sa mission et sera alors l’unique responsable (Assemblée plénière, 19 mai 198810)

 

En tout état de cause, l’organisateur mis en cause par le spectateur, en raison de la faute de son salarié, peut agir envers ce dernier sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

 

Il existe, cependant, des causes exonératoires de responsabilité du cavalier ou encore de l’organisateur de manifestations sportives.

 

C.Les causes exonératoires de responsabilité de l’ensemble des acteurs

Les causes exonératoires sont celles qui ont été précédemment exposées. Il existe cependant une exception pour le cavalier en compétition.

 

En application de la théorie de l’acceptation des risques par les cavaliers en compétition, les cavaliers peuvent, dans certains cas, être exonérés de leur responsabilité, et ce uniquement pour les dommages matériels. (voir II.A.2 : régime dérogatoire : l’acceptation des risques).

 

A côté de ce cas spécifique ne pouvant être appliqué qu’en présence des cavaliers en compétition, il y a trois autres cas d’exonérations :

  • La faute de la victime (1)
  • Le fait d’un tiers (2)
  • La force majeure (3)

 

1.La responsabilité ne peut pas être engagée lorsque la victime de l’accident a commis une faute

En théorie, la faute de la victime devrait exonérer la personne dont la responsabilité a été retenue par les juges.

Pour que la faute de la victime soit retenue, il faut qu’elle ait concouru à la réalisation du dommage.

Pour que l’exonération du responsable soit totale, il faut que la faute de la victime présente les caractères de la force majeure, c’est-à-dire qu’il faut que la faute soit imprévisible, extérieure, et irrésistible.

En matière délictuelle, l’imprévisibilité s’apprécie au jour du fait dommageable.

Elle repose essentiellement sur une appréciation du comportement de l’individu « avant la réalisation de l’événement ». Elle s’apprécie par référence à une personne prudente et diligente, et en tenant compte des circonstances de lieu, de temps, de saison. Il faut que le sujet n’ait pas pu prévoir la réalisation du dommage.

 

La condition d’extériorité implique que l’événement soit, ou bien extérieur à la chose qui a causé le dommage et dont le gardien avait la garde, ou bien extérieur au gardien, ou bien extérieur aux personnes par lesquelles le gardien exerce la garde.

L’exemple le plus habituel d’événement « extérieur » est celui des catastrophes naturelles (événements climatiques exceptionnels, cyclones, inondations, glissements de terrain), voire des guerres, pour autant qu’elles n’aient pas été prévisibles.

 

Comme déjà exposée, l’irrésistibilité implique, quant à elle, une appréciation du comportement de l’individu « pendant la réalisation » de l’événement. Il faut que la personne concernée ait été dans l’impossibilité d’agir autrement qu’elle l’a fait. Il faut que l’événement soit « inévitable » ou « insurmontable » et la laisse impuissante.

La jurisprudence recherche le plus souvent si l’événement a engendré ou non pour le sujet une impossibilité d’éviter la réalisation du dommage et en vérifiant si un individu moyen, placé dans les mêmes circonstances, aurait pu résister et surmonter l’obstacle.

L’évolution récente de la jurisprudence tend d’ailleurs à faire de l’événement « irrésistible » le critère sinon unique, du moins central de la force majeure.

Concernant la responsabilité du fait d’autrui, la responsabilité de l’organisateur ne peut pas être engagée quand le comportement de la victime a contribué à la réalisation du dommage (Cour de cassation, 2e chambre civile, 13 novembre 1992).

Le propriétaire gardien ne peut pas être responsable dès lors que la victime est intervenue dans la réalisation du dommage.

Ainsi, la jurisprudence a pu estimer qu’« en se positionnant de manière à recevoir une ruade, dont, en tant qu’habitué des chevaux, il ne pouvait ignorer l’éventualité, Monsieur C. a commis une faute de nature à exonérer Monsieur R. de la présomption de responsabilité qui pèse sur lui en tant que propriétaire du cheval » (Cour d’appel de Lyon, 1re chambre civile B, 7 septembre 2010).

La faute de la victime est la cause d’exonération la plus fréquente, mais ce n’est pas le cas, de l’exonération du fait du tiers.

 

2.Le responsable peut être exonéré par le fait d’un tiers

Il faut pour être exonéré que le fait du tiers présente les caractéristiques de la force majeure, c’est-à-dire soit extérieur, imprévisible et irrésistible, de telle sorte que le responsable ne pouvait pas empêcher que le dommage ne se produise.

En principe, peu importe que le tiers ait commis une faute ou non, dès lors qu’il a provoqué le dommage, il pourra être retenu responsable, et dans ce cas, il s’agira d’une exonération totale.

Alors que si, le tiers a simplement contribué à la réalisation du dommage, l’exonération ne sera que partielle pour le responsable (Cour de cassation, 2e chambre civile, 15 janvier 1960).

 

Il sera également rappelé que le centre équestre ne peut jamais échapper à sa responsabilité en invoquant le fait de son préposé, c’est-à-dire du fait du moniteur salarié (Chambre des requêtes, 22 janvier 1963).

En effet, la responsabilité du fait de son préposé et le fait d’un tiers sont incompatibles. C’est-à-dire que le salarié ne peut être considéré comme un tiers pour l’organisateur de manifestations sportives qui l’emploie !

 

La dernière cause d’exonération est la force majeure.

 

3.L’exonération de la responsabilité des acteurs par la force majeure

La force majeure, précédemment étudiée, est un événement qui nécessite la réunion de trois conditions détaillées ci-avant, à savoir un caractère extérieur, imprévisible et irrésistible. L’événement permet d’exonérer le responsable d’un dommage dès lors que cette personne n’a pas pu empêcher le déroulement de cet événement.

 

Ainsi, pour un cavalier dont la responsabilité est engagée, le fait de ne pas avoir pu rattraper son cheval échappé n’est pas un cas de force majeure (Cour de cassation, 2e chambre civile, 6 novembre 1985).

La force majeure est rarement accueillie par les juges comme cause exonératoire de responsabilité.

En effet, ils estiment le plus souvent que le cavalier doit tenir sa monture, et que l’organisateur de manifestations sportives doit entretenir les infrastructures mises à dispositions des spectateurs.

L’élément qui est le plus souvent admis par la Jurisprudence est la faute de la victime qui s’est placée derrière un cheval et a reçu un coup de sabot.

 

 

Conclusion

 

Dans cette étude, il est apparu clairement que la mise en œuvre de la responsabilité des acteurs du monde équestre résulte d’un ensemble de textes nationaux qui constitue un ensemble juridique, complété par une jurisprudence abondante.

En effet, dans le domaine de la responsabilité équestre, deux grandes responsabilités sont susceptibles d’être engagées par la victime : la responsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle.

Qu’il s’agisse de l’organisateur de manifestations sportives, du moniteur d’équitation, du centre équestre ou du loueur d’équipée, la victime est protégée par une obligation de sécurité et de prudence.

 

Le cavalier étant le plus souvent la victime. Il devra démontrer que ces acteurs n’ont pas respecté cette obligation de moyens en prouvant qu’ils ont commis une faute, un dommage et qu’il existe un lien de causalité entre cette faute et ce dommage.

La responsabilité contractuelle de tous ces acteurs est relativement aisée à mettre en œuvre.

En effet, la loi prévoit clairement la responsabilité du débiteur de l’obligation et la jurisprudence a le souci constant de voir réparer le préjudice de la victime et faire peser sur le moniteur, par exemple, une part de responsabilité.

Il convient, cependant, de rappeler que l’équitation est un sport à haut risque, et qu’il appartient aux cavaliers, en particulier, d’en prendre conscience.

 

En outre, faire peser de trop importantes responsabilités sur les centres équestres et moniteurs indépendants peut freiner les ambitions.

 

Enfin, il est rappelé que les centres équestres, moniteurs indépendants, loueurs d’équidés et organisateurs de manifestations sportives retenus comme responsables sont le plus souvent couverts par leur assurance pour garantir la réparation des dommages causés aux victimes.

C’est bien pour cette raison que le défaut d’assurance est pénalement sanctionné.

En matière équestre, la responsabilité délictuelle du cavalier peut être très aisément engagée au titre de la responsabilité du fait des animaux par un autre cavalier ou par un passant qui aurait reçu un coup de sabot du cheval, car le cavalier auteur est considéré comme le gardien du cheval puisqu’il en a l’usage, la direction et le contrôle.

De manière générale, la personne qui au moment du dommage s’est vu transférer la garde par le propriétaire du cheval est considérée comme le gardien et est donc responsable à ce titre.

 

Enfin, la victime sera le plus souvent protégée. A cette fin, elle doit mettre en œuvre la responsabilité contractuelle ou la responsabilité délictuelle de l’auteur du dommage.

En revanche, la victime n’est naturellement pas protégée lorsqu’elle a participé à la réalisation de son dommage ou lorsqu’elle a accepté les risques en compétition.

 

On rappellera que l’exonération pour acceptation des risques en compétition présente en réalité une application limitée dans son étendue (préjudice matériel) et ses conditions de mise en œuvre (risques normaux liés à la compétition).

Même lorsque la victime a contribué à la réalisation du dommage, la jurisprudence opère le plus souvent un partage des responsabilités et n’admet qu’une exonération partielle du gardien du cheval.

Ainsi, il convient pour tout propriétaire d’un cheval, comme de tout autre animal, de s’assurer au titre de sa propre responsabilité civile, même en l’absence d’obligation légale.

Il sera d’ailleurs précisé que la majorité des compagnies d’assurance prévoit le bénéfice des garanties d’assurance au titre de la responsabilité civile pour les dommages causés par la pratique de l’équitation ou la possession d’un équidé, et ce sans surprime.

 

En conclusion, il serait bon que le législateur crée un nouveau régime de responsabilité objective en matière sportive, afin d’éviter les hypothèses privant les victimes de toutes indemnisations au titre de la théorie de l’acceptation des risques.

 

 

 

 

 

 

1. Cheval et droit, P.de Chessé, avocat au barreau de Marseille

2. Selon la Commission spécialisée équitation du comité national olympique et sportif français

3. « Les fédérations sportives agréées peuvent conclure des contrats collectifs d’assurance visant à garantir les associations affiliées et leurs licenciés dans les conditions prévues aux articles L.321-1, L.321-4, L.321-6 et L331-10 » :

4. « Lorsque la fédération agréée à laquelle est affiliée l’association sportive propose aux membres de celle-ci, qui sollicitent la délivrance d’une licence, adhérer simultanément au contrat collectif d’assurance de personnes qu’elle a souscrit, elle est tenue : 1° De formuler cette proposition dans un document, distinct ou non de la demande de licence, qui mentionne le prix de l’adhésion, précise qu’elle n’est pas obligatoire et indique que l’adhérent au contrat collectif peut en outre souscrire des garanties individuelles. 2° De joindre à ce document une notice établie par l’assureur conformément au deuxième alinéa de l’article L141-4 du Code des assurances.

5. “L’organisateur d’une promenade à cheval qui a l’obligation de mettre en œuvre tous les moyens, afin d’empêcher qu’un accident se produise ou ait de graves conséquences corporelles pour le cavalier, doit non seulement proposer mais exiger de ses clients, le port de la bombe pour participer à la promenade, quand bien même la réglementation actuelle ne l’imposerait pas”.

6. “La présence d’un chien sur le circuit de la promenade et la réaction craintive du cheval monté par Monsieur G., n’ont pas un caractère irrésistible et imprévisible”

7. “On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde”.

8. Note Blanche de Granvilliers Lipskind, avocat à la cour

9. “N’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant”.

10. “Le commettant ne s’exonère pas de sa responsabilité que si son préposé a agi hors de ses fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions”. 

Publié le 25/07/2016

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